Bilbao, dans les yeux d’Audrey
Bilbao, dans les yeux d’Audrey. Talavante triomphe.
Bilbao et son sable gris est une image d’Epinal tauromachique. Ses sièges baquets, désormais multicolores, essaient de donner une note de gaîté. Désormais, ils surlignent surtout la désaffection du public local pour la la partie taurine d’Aste Nagusia. D’ailleurs le programme officiel des fêtes a négligé sans vergogne le programme de Vista Alegre. Elle n’a d’ailleurs rien de très joyeux quand on y pense bien la vue de cette arène. Tanquée dans un quartier tristounet de la capitale de la Biscaye, ce sont souvent les nuages gris plomb qui viennent lécher l’édifice.
En ce mercredi 23 août, c’est un peu par hasard que je me retouve dans l’enceinte. Audrey 25 ans nouvelle venue dans la famille ne connait pas la corrida mais fait preuve de curiosité. Elle a envie de découvrir cet univers. Après la visite complète des arènes de Bayonne, le visionnage des images de One Toro m’a permis de confirmer qu’il y avait un véritable intérêt pour une initiation et aucune sensiblerie particulière vis à vis du combat de cet animal qu’elle trouve beau et majestueux. Quand on habite au pays basque, aux alentours du 20 août il n’y a pas trente six solutions qui s’offrent à vous pour voir une corrida. Direction Bilbao.
Il faut dire qu’aller voir Morante toréer est loin de me déplaire. Ses compagnons de cartel (Talavante, Manzanares) toros compris (Juan Pedro Domecq) n’ont pas spécialement mes faveurs. Au moment de pénétrer dans l’arène, ce n’est pas le poignet fragile de celui de La Puebla ou l’éventualité de jarrets en coton des pupilles de Jean Pierre Domecq qui me préoccupent, mais plutôt comment nous allons arriver à gérer la canicule locale. On croit rêver! Le thermomètre dépasse les quarante degrés au moment du paseo. Même le plus acharné des climato-sceptiques aura bien du mal à développer des arguments solides pour convaincre le moindre quidam, que le déréglement climatique n’est qu’une vue de l’esprit de quelques illuminés. Quelle tristesse de ne voir qu’un bon tiers des sièges occupés quand s’ébroue le paseo.
La Corrida
Les toros du sieur Domecq ont au physique été de belle présentation et armés fin. Côté moral, ce ne fut pas un jour pour montrer les tercios de piques dans les écoles taurines, et au final la classe du sixième surnagea, bien que ses forces l’abandonnèrent assez vite dans la muleta.
Comme le premier Domecq n’avait qu’une envie modérée d’en découdre, il n’en fallut pas plus à Morante pour rapidement clore les débats. Audrey me demanda si c’était toujours comme cela…heureusement que non chére béotienne!
La faenita droitière de Manzanares qui alla de « menos a mas », fit dire à ma voisine qu’il y avait enfin un peu de spectacle. Matias laissa les musiciens en paix et, les quatre pinchazos, le silence s’installer.
Le troisième de la maison Domecq offrit sa gentille noblesse à un Talavante en forme. Le torero donna une agréable faena ambidextre conclue d’une entière efficace. Enfin un qui a bien tué me dit Audrey tandis que Matias sortait son mouchoir.
Morante dut passer en urgence du côté du callejon en recevant le quatrième, pas de nature à le (et nous) rassurer pour la suite. Sur la corne droite, l’artiste distilla quelques passes de qualité quand une insulte (« ¡Estás muy gordo! ») fusa des gradins. Ni une, ni deux, Morante alla chercher l’épée illico pour porter au 3ème jet, une vilaine estocade. Pas de quoi faire changer d’avis Audrey sur le torero. Par contre ce fut un bon apprentissage de ce qu’était une bronca.
No hay quinto malo dis-je à Audrey. J’aurais dû fermer ma bouche.. Molle fut la bête à cornes, molle fut la prestation de Manzanares. Heureusement la chaleur était devenue presque supportable.
Les qualités du sixième s’exprimeront dès la réception au capote d’un Talavante fin et décidé. Le Domecq s’élança de bon cœur à la pique mais ses forces et sa puissance ne furent pas au rendez-vous. Ce manque de forces limita les charges au dernier tiers, mais Talavante sut profiter de la moindre goutte de la belle noblesse du toro. Dans une œuvre à haute valeur esthétique, le public fut embarqué. Comme l’épée fut efficace, les mouchoirs (dont celui d’Audrey) s’agitèrent et les deux de Matias tombèrent recta du palco.
Je ne sais si Audrey deviendra aficionada un jour. C’est avec le sourire qu’elle quitta les gradins de Vista Alegre et c’est déjà pas mal.
Fiche Technique
- Bilbao, arènes de Vista Alegre , 4ème festejo des Corridas Generales 2023
- Toros de Juan Pedro Domecq pour
- Morante de la Puebla : sifflets, bronca
- José Mari Manzanares : silence, silence
- Alejandro Talavante : oreille, deux oreilles
- 12 piques
- Saluts de Miguelin Murillo et El Fini au 6ème
- Président : l’immuable Matias González (29 ans d’ancienneté , 74 ans d’âge)
- Public :un tiers d’arène
- Météo : canicule à faire la fortune des marchands de glace.
Philippe Latour (vu du tendido 5 file 15, soleil à volonté)
A l’instar de Picasso, Morante fait encore la preuve qu’on peut être un génie ET un trou-du-cul.
Je n’ai aucun respect pour ce type qui n’en a pour personne.
Un VRAI artiste n’a pas besoin d’afficher son mépris du « bas peuple » de cette façon.
Quand est-ce qu’une arène entière aura le courage de lui tourner le dos pendant sa prestation ? Mais chacun a bien trop peur de rayer LA faena du siècle ! Et alors ? Votre dignité n’a pas plus de valeur que quelques passes, même exceptionnelles?
Ce type ne devrait plus oser se montrer.. Je ne vais à aucune corrida où il toree, hélas il est de beaucoup de carteles. UNE HONTE