Juan del Alamo «je suis un torero qui a beaucoup à donner.»
Juan del Alamo a été novillero puntero (il a débuté à Mugron en 2009). Son début de carrière de matador de toros (alternative en 2011) est marqué de nombreuses oreilles coupées à Madrid, lui ouvrant une fois la puerta grande de Las Ventas (juin 2017). Néanmoins, peu à peu, il va s’effacer de l’escalafon taurin, jusqu’à couper avec le mundillo (aucune corrida en 2022). Le gusanillo n’est jamais très loin, et peu à peu l’illusion revient. Juan del Alamo va revêtir à nouveau le costume de lumières dans le cadre de la Copa Chenel le 11 mars. Villa del Prado, village où se déroulera cette corrida pourrait-être le point de départ d’une carrière qui redémarre. A 31 ans, Jonathan Sánchez Peix » Juan del Alamo », est encore jeune. Tertulias l’a rencontré.
Tertulias: « Juan, bonjour. Pour commencer, parle-nous un peu de toi. Qui est Juan del Álamo? »
Juan del Alamo : « Je suis un torero qui a déjà beaucoup d’expérience, avec une personnalité affirmée, un torero de caractère. Je suis un torero qui se livre entièrement dans l’arène, avec la maturité que l’on acquiert avec le temps. Je suis un torero qui n’a pas encore atteint le sommet et surtout qui n’a pas dit son dernier mot. »
Tertulias: « Tu parles seulement du torero. Fais-tu une différence entre ta personne et le torero? »
Juan del Alamo : « Je suis un garçon normal. J’aime être naturel. Je suis quelqu’un de sincère et qui essaye toujours de rester lui-même. En tant qu’individu, j’ai mes défauts bien sûr, mais je pense être plutôt une bonne personne. (rires)»
Tertulias: « Dans le sud-ouest de la France, nous te connaissons bien. Tu as été le triomphateur de l’année 2015. Quelle est ta relation avec le public français? »
Juan del Alamo : « Ce lien date de mes débuts. Je me suis présenté comme novillero sans picadors en France et tout s’est enchainé. La France a été durant toute ma carrière une vitrine évidente de ce que j’ai été et de ce que je suis en tant que torero. Beaucoup de ce que j’ai obtenu, je le dois à la France. Ce sont de nombreux et beaux souvenirs. Je m’y suis toujours senti apprécié. J’espère pouvoir y revenir bientôt et lui offrir de grandes courses. »
Tertulias: « En 2017, après avoir déjà coupé de nombreuses oreilles à Madrid, tu ouvres la grande porte. Raconte nous»
Juan del Alamo : « Madrid est l’arène qui m’a le plus donné dans ma carrière, le mieux compris ma personnalité comme torero. C’est là que j’ai vécu mes meilleurs moments. Bien sûr, la grande porte c’était exceptionnel. C’est le sommet de ma carrière à ce jour. »
Tertulias: « Ça t’a vraiment servi? »
Juan del Alamo : « Je pense oui. Je suis toujours arrivé à Madrid dans une situation difficile. J’avais besoin de Madrid pour la suite de mes temporadas. ça m’a servi. »
Tertulias: « Dis-moi si je me trompe, mais 2017 est une année clé dans ta carrière. »
Juan del Alamo. : « J’avais mis la barre haute avec cette grande porte à Madrid. Ce sont deux oreilles mais la faena au premier taureau était très importante. Mais la saison ne s’est pas envolée.
En 2018, il y a eu des courses importantes mais l’année a été impactée par les mauvais coups d’épée. J’ai réussi à bien toréer dans plusieurs arènes de première catégorie mais j’ai mal tué. Je crois que c’est ce que j’ai payé la saison qui a suivi avec cette chute du nombre de contrats et ce long arrêt. Et puis il y a eu la pandémie…»
Tertulias: « Tu étais au cartel lors de cette course tragique à Aire sur l’Adour (ndlr: jour de la cornada mortelle d’Ivan Fandiño). Est-ce que cela t’a marqué ? Ça a eu un impact ?»
Juan del Alamo : « Evidemment, ça m’a marqué à jamais. C’est une après-midi que je n’oublie pas comme torero. Ivan Fandiño, qu’il repose en paix, s’est toujours engagé dans cette profession et dans l’arène. La fin n’a pas été ce qu’elle méritait d’être. Personne ne mérite ça. Mais la tauromachie a également cette face tellement dure. Il faut le garder en mémoire, et s’en servir pour être plus fort et se rappeler que nous sommes dans une profession intègre. Nous les toreros, nous devons en être fiers et continuer à avancer. Ce spectacle est fort et je me sens grandi d’être torero. »
Tertulias: « Le fait de devenir père également t’a changé ? »
Juan del Alamo : « Ça change tout. J’ai toujours eu peur mais là, je la ressens plus encore. Quand tu pars de la maison et que tu dis au revoir à ta femme, à ton fils… Tu as la responsabilité de la course bien sûr, mais tu as une nouvelle responsabilité qui te charge de davantage de peur et d’une nervosité extrême qui est difficile à assumer. La plus grande force d’un torero, c’est de réussir à surpasser ça. Ce que je veux c’est offrir un triomphe à Julio, mon fils, pour qu’il voit son père réussir et qu’il réalise comme la tauromachie est grande et belle. »
Tertulias: « A quelques jours de ton retour, comment te sens-tu ? »
Juan del Alamo : « Je me sens concentré, plein d’incertitudes car c’est un an et demi sans porter un habit de lumière, mais j’ai une grande confiance en moi. Je suis prêt physiquement et mentalement et c’est ce qui me fait avancer. Ainsi, j’affronte la course de samedi avec beaucoup d’espoirs et la responsabilité qu’il se doit.
Il s’est passé tellement de choses : j’ai vécu le meilleur, le pire, j’ai fait parler de moi mais j’ai aussi connu le revers de la médaille. Je sais qui je suis, ce que j’ai à offrir, je sais où je veux arriver et comment le faire. Je sais toréer et ce que signifie se jouer la vie. J’ai connu le côté sombre de cette profession et je l’assume pour pouvoir donner le meilleur de moi-même. Si la chance est de mon côté, nous verrons renaitre Juan del Alamo, sans perdre ce qui m’a toujours caractérisé. L’expérience me permet de penser que ça peut être une importante après-midi. »
Tertulias: « Tu as d’autres contrats? »
Juan del Alamo: « Nous nous battons avec Lázaro Carmona qui m’apodère cette année. C’est compliqué. L’opportunité est là, samedi. Je compte beaucoup dessus et c’est ce sur quoi je me concentre. Comme je l’ai toujours pensé, il n’y a pas de meilleur apoderado que moi-même. »
Tertulias: « Que dirais-tu à un empresario (trois arguments) pour le convaincre de te programmer ? »
Juan del Alamo: « Je suis un torero qui peut apporter de la profondeur, de la maturité, de la personnalité. Je suis différent et je ne me considère ni meilleur ni moins bon qu’un autre, mais différent oui. Je suis différent car j’essaye toujours de transmettre ce que je ressens. J’en ai besoin et je veux franchir cette ligne que l’aficion réclame. Je suis un torero qui a beaucoup à donner. »
Portrait chinois:
- Une couleur: comme torero, le blanc.
- Un sport: le football.
- Une chanson: j’écoute beaucoup Sabina… “500 noches”
- Un animal: le chien.
- Une arène: Madrid, sans hésiter.
- Une ganadería: Montalvo
- Un torero: Morante
Propos recueillis par Fanny
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