Mugron: grande faena de Solalito
Il ne fallait pas quitter les gradins des arènes de Mugron au cinquième toro sous peine de rater le meilleur moment de la course. Jusqu’alors la faiblesse et le manque de fond des novillos de José Cruz n’avaient pas permis aux novilleros de s’exprimer pleinement. Yon Lamothe avait coupé une oreille, Jorge Martinez fait une vuelta. C’était peu pour une novillada très attendue après le très bon lot de cette ganaderia sorti dans ces arènes en 2021. L’excellent sixième et un très bon Solalito ont sauvé la tarde. Le nîmois a perdu avec les aciers, les trophées gagnés à l’issue d’une grande faena.
Fiche Technique
- Arènes de Mugron : Novillada des Pâques Taurines 2022
- 6 novillos de José Cruz, bien présentés mais faibles et manquant de fond à l’exception de l’excellent sixième pour
- Yon Lamothe : un avis et une oreille, silence
- Jorge Martinez : un avis et salut, deux avis et vuelta
- Solalito : un avis et silence, un avis et vuelta
8 piques Cavalerie Heyral, salut de Juan Rojas et José Ruiz au cinquième
Président Arnaud Imatte, Trois quarts d’arène, ciel bleu et chaleur printanière.
Toro par toro
Bien présenté, le premier novillo est juste de forces. Mal mis en suerte, il prend une première pique en poussant sur une seule corne. Il ne pousse pas à la seconde rencontre. . Yon Lamothe le double sans trop l’obliger. Dès que le novillero lui fait baisser la tête, le José Cruz fléchit. Yon le toréé à mi-hauteur. La faena, vu le problème de motricité du toro, ne transmet pas beaucoup d’émotion. De plus, quand il est cité sur la corne gauche, l’utrero se montre dangereux. Le français s’adapte au contexte. Il enchaîne les sériés à droite ; Il peut en fin de faena, dans le terrain des planches, revenir à gauche pour, enfin, lier une série à gauche. L’ensemble a manqué de transmission, mais le français avait fait son possible. Il tue d’une entière en avant et légèrement tombée. Pétition pas tout à fait majoritaire, le président accorde une oreille.
Le second est abanto. Il mer la tête mais accroche la cape de Jorge Martinez. Lui aussi mal mis en suerte, prend un puyazo sans vraiment pousser. Il est comme le premier juste de forces. La présidence change le tercio. Le novillo est suelto mais noble. Martinez débute sa faena à gauche. La première série est bien, la seconde, qui se termine par un désarmé, moins.
Une des caractéristiques du triomphateur des novilladas andalouses est une certaine inconstance. Il alterne des séries templées et efficaces avec d’autres plus brouillonnes au cours desquelles il se met en danger. La faena à un toro, noble mais avec peu de personnalité, connait un passage à vide. Le final, avec une série sur chaque main, est meilleur que les séries précédentes. Un pinchazo, une entière et trois descabelleos plus tard, le torero de Murcia est invité à saluer.
Le troisième est un « costaud ». Suelto, il met Solal en difficulté à la cape. Après un puyazo pris en poussant sur une seule corne, le novillo fait une vuelta de campana. Solal, maladroit dans la pose des deux premières paires de banderilles, se rattrape avec une très bonne troisième . Le toro est faible et tombe au milieu des trois premières séries à droite. Lors de la quatrième, il prend en marchant une naturelle basse et trois autres à mi-hauteur. Le nîmois s’applique, essaie de donner de la transmission à la faena en diminuant les distances. Mais le toro, faible, ne transmet pas beaucoup d’émotion et la faena va à menos. Silence après un pinchazo, une entière basse et trois descabellos.
Les trois derniers novillos sont d’un semental différent des trois premiers. A la cape, ils auront plus d’énergie et de fixité que les précédents.
Le quatrième est un superbe animal quasi-toro par son physique. Il part de loin et prend un bon puyazo avant d’en prendre un nettement moins orthodoxe avec un premier impact très bas rectifié par le piquero. A la sortie de cette seconde rencontre, il fait une spectaculaire vuelta de campana. Très marqué par le tercio de varas et la cabriole qui s’en est suivie, le toro est complètement étéint dès les premiers muletazos de la faena. Yon ne peut qu’abréger.
Le cinquième est lui aussi juste de forces. Il prend un seul puyazo sans pousser. Juan Rojas et José Ruiz saluent après un très bon tercio de banderilles. Le José Cruz est noble et faible. Dès le début de la faena, Il charge en marchant, suit la muleta avec soseria. Le début de faena ne transmet pas grand-chose. Il met en difficulté Jorge Martinez qui n’arrive pas à terminer ses séries tellement le bicho colle à la muleta. Il parvient à trouver le rythme et la manière en fin de faena. Le final sans être transcendant est plus intéressant et connecte avec un public qui n’a qu’une seule envie s’enthousiasmer. Jorge Martinez tue mal, accumule les descabellos mais fait quand même une vuelta.
Jusqu’à la sortie du sixième toro, le public est resté sur sa faim et a eu très peu d’occasion de vibrer. Il ne fallait pas quitter les gradins avant la fin de la course car le sorteo avait gardé le meilleur toro pour la fin. Le sixième, joli novillo bien fait, remate dès sa sortie dans tous les burladeros. Solalito est un très bon capeador . Il le prouve en recevant le José Cruz avec des lances de capotes variées et très bien exécutées. Le quite, après l’unique puyazo, est lui aussi de très belle facture..
Solalito hisse son niveau, réalise un très bon tercio de banderilles avec un superbe quiebro de rodillas dans les tablas. Le public peut enfin s’enthousiasmer. Le toro, qui avait marqué le coup à la pique, se reprend lors du second tiers. A la muleta, il est noble et a beaucoup d’entrega. Cela permettra au nîmois de réaliser une très belle faena. Débuts de rodillas, séries des deux mais templées et élégantes, Solal a pris la mesure du toro et peut exprimer sa tauromachie élégante et sincère. On distinguera parmi les muletazos de cette très belle faena, les dernières séries et les naturelles de face finales. Les deux oreilles sont presque coupées. Malheureusement, la demie en place est insuffisante et la série de descabellos qui s’en suit prive le nîmois de trophée. Ovation pour ‘arrastre .La vuelta du torero et l’ovation de despedida sont très chaleureuses.
Il s’en est fallu d’un toro, mais Solal et le public quittent les arènes avec le sourire.
Thierry Reboul (photos Philippe Latour)
L’album photos complet c’est ici ⤵️
Sur ce WE pascal vécu à Aignan et à Mugron un seul novillero a posé les banderilles, c’est trop peu. Alors saluons l’envie de Solalito qui s’est engagé dans un exercice qui relève de l’apprentissage du métier et devrait être généralisé. Qu’attentons des toreros en formation si ce n’est aussi des gestes « noverils »?