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Sept ans d’éternité

Sept ans d’éternité

17 juin

En 2017, il y a sept ans comme bien souvent, nous sommes allés aux arènes l’esprit tranquille. Il faisait beau, les gradins d’Aire sur l’Adour s’étaient mieux remplis que d’habitude. Le cartel était solide. Nous allions vivre un jour d’aficion ordinaire en espérant que l’extraordinaire puisse se produire. Oui mais voilà, il y a sept ans, le temps s’est arrêté et plus que l’exceptionnel, se produisit l’irréparable. Depuis, chaque 17 juin me revient à la figure comme un boomerang dont le retour serait mal calculé. Alors autant se souvenir des jours moins sombres, celui du rire d’un homme heureux, celui d’Ivan Fandiño.

Bayonne, mai 2015

C’était le temps d’une rencontre avec des enfants. Le temps des rires, où le futur se conjugue au présent. Les masques tombent pour révéler sans fard la vraie nature des âmes et des sentiments. Dans un instant de grâce, le rire d’Ivan Fandiño et de la jeune Lysea se mêlent en irradiant les arènes entières. Quelques secondes auparavant, dans un pas de deux improvisés, ils vont faire tourner autour d’eux un petit veau. Au fil du temps, Lysea s’accroche de plus en plus aux bras protecteurs du torero dans une étreinte allant grandissante et touchante. Fandiño rend les armes devant tant de fougue. Dans un rire conjugué qui explose en éclats , ils reviennent aux barrières unis dans une complicité que l’on pourrait croire ancienne.

Dans cette journée chère à ma mémoire, je me rappelle de ce jeune garçon autiste se laissant apprivoiser par le lion. Devant les yeux de sa maman émue il accepta d’être guidé, donnant sa confiance sans retenue lui naturellement si distant, si méfiant. Personne ne se rendit compte de sa différence!!! Quelle leçon! Un enfant ne triche pas et sait vous rendre immédiatement ce que vous lui donnez, magie de l’innocence! Cocteau disait « la haine est absente d’une corrida , n’y règnent que la peur et l’amour! ». Ce cliché en est la simple et parfaite illustration. C’est sûrement pour cela qu’il continue à m’émouvoir quand je le regarde.

Cette photo a fait le tour de la toile. Elle n’est pas inédite mais de toutes celles que j’ai pû prendre, elle reste pour moi bien le symbole que « le lion ne cessera jamais de rugir » pour l’éternité.

Philippe Latour

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