Vega-Villar, l’histoire des Patas Blancas
Vega-Villar, l’histoire des Patas Blancas
Au campo, il est facile de les reconnaitre. Robes berrendas (bicolores avec un fond blanc) et leurs pattes blanches. Les Patas Blancas ou Vega-Villar sont en voie de disparation. Stars des arènes dès la création de l’élévage, ces toros ont permis, jusqu’à la fin des années soixante, aux figuras de triompher. Aujourd’hui, ils sont relégués aux arènes de troisième catégorie et à la rue. Pourtant l’histoire a bien commencé.
Création de l’encaste Vega Villar
José Vega, ganadero par orgueil
1910, José Vega était un homme riche. Un brin excentrique et parfois affabulateur, il allait de feria en feria. Ses interventions lors des tertulias faisaient souvent référence à la décadence de la cabaña brava (et oui, déjà). A force de l’entendre râler, ses amis (et autres) l’ont mis au défi de faire mieux et de créer sa propre ganaderia. Difficile pour l’honneur de l’hidalgo que José Vega se dérobe face au challenge qui lui était proposé. L’homme se fit mystérieux et moins présent autour des arènes et dans les réunions d’aficionados.
D’un défi sont nés les Patas Blancas
Un beau jour de l’automne 1910, José Vega invita ses amis, surpris par l’annonce, à son premier herradero le 18 décembre. Il avait entretemps louer la finca de Navalcaida à Cerceda et fait l’acquisition d’un semental et de vaches. Le premier est un Santa Coloma d’origine Murube/Ibarra nommé Cuchareto. Santa Coloma était à l’époque une ganaderia dans un très bon moment. Ce n’était pas le cas de Veragua (origine Vasquez) auquel José Vega a acheté 65 vaches dont 35 avec un veau. Cuchareto fut mis à l’ouvrage pendant quelques années avant d’être « muté » chez Hermanos Flores ( grands-oncles de Samuel Flores) puis chez le Marquis de Villadoglio. L’année suivant ce sont deux autres sementales Toronjito et Fuentecillo de Santa Coloma, mais d’une rame plus Saltillo, qui le rejoignirent.
Ainsi sont posées les premières pierres d’un nouvel encaste dont un grand nombre de produits ont un patrimoine génétique marqué par les origines Saltillo bien que l’on retrouve des traces Murube sur une partie de ces toros.
Le créateur jette l’éponge
Le 18 décembre ce sont 37 mâles et femelles issus du semental ibarreño qui sont marqués avec un fer récupéré auprès d’un élevage de vaches laitières.
Pour faire la promotion de son nouvel élevage, José Vega organise des journées au campo où il invite la presse taurine , la direction des arènes de Madrid et des ganaderos voisins. Le champagne coule à flot, les petits en-cas et autres nourritures sont à profusion. Le ganadero soigne son image mais y laisse une partie de sa fortune. Après trois ans, José Vega est au bord de la faillite personnelle et doit vendre son élevage sans jamais avoir fait lidié un seul de ses produits.
De Vega à Vega-Villar
Ce sont de riches viticulteurs de Zamora, les frères Villar, qui ont acheté le bétail de José Vega. Dès le début, ils ajoutent au troupeau deux sementales du Conde de Santa Coloma, Chamusquino et Gitano, accentuant ainsi le sang Saltillo . Ils font de Cuchatero, leur semental principal, vendant le semental ibarrño à la famille Flores. La nouvelle ganaderia fait ses débuts en 1916 avec un premier lot de novillos à Zamora et un autre à la Coruña. Dès 1917, le fer se présente dans des arènes plus importantes telles Pampelune, Santander, Valence. L’année suivante, les frères Villar sortent des novilladas et une corrida (Estella).
Le début de la notoriété pour les Vega-Villar
En 1919 sortent les premiers produits de Chamusquino. A partir de cette année , le nombre des bêtes lidiés augmente et les résultats sont excellents. La ganaderia (et le nouvel encaste) est partie sur de bons rails. En 1922, les deux frères Villar se séparent. Vittorio vend sa part de l’élevage , et le fameux fer des vaches laitières, à Luis Encinas et son fils José de Ledesma.
Francisco reste à La Granja, la finca familiale. Il fera lidier en 1923 douze toros, en 1924 dix. Que ce soit à Madrid ou à Pampelune , les lots sortent bons. Marcial Lalanda aime à toréer ces toros que le public commence à appeler Patas Blancas. En effet, les toros sortent avec robes variées et surtout berrendas. Il faut y voir l’apport des vaches de Veragua.
Francisco Villar, un ganadero expert
Tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles pour Francisco et son élevage. Pourtant les choses vont se gâter. En 1926, le trapio des toros soulève indignations et critiques. Les critiques émettent des doutes sur l’âge des bêtes lidiées. L’image de l’élevage se détériore affectant Francisco qui connait par ailleurs des difficultés dans ses activités professionnelles. Il prend la décision de vendre sa ganaderia au salmantin Arturo Sanchez Cobaleda qui transfère personnel et bétail à Terrubias.
Les affaires de la famille Villar continuèrent à péricliter en particulier au moment de l’avènement de la République. La propriété est saisie et vendue et on n’entendra plus parler des frères Villar.
L’encaste Vega-Villar est, en 1926 , créée mais elle va à partir de cette année se développer selon deux lignes généalogiques différenciées et différentes : la rame Encinas-Galache et la rame Cobaleda- Barcial.
La rame Cobaleda- Barcial.
Le prix de vente de la ganaderia de Francisco Villar est plus qu’élevé. Pourtant Arturo Cobaleda fera une très bonne affaire. Il récupère un encaste qui donne des toros de qualité et il pourra compter sur la connaissance du bétail et le professionnalisme de Lucio le mayoral présent depuis l’époque de Paco Vega. Dès la présentation à Madrid en 1929 les résultats sont bons et le fer tient un rang reconnu dans la hiérarchie de la cabaña brava.
Cela continuera même après le décès d’Arturo en 1942. L’élevage est alors géré par ses cinq enfants Manuel, Pilar, Maria, Ignacio et Jesus qui se révèleront être d’excellents ganaderos. Pepe Luis Vasquez et Manolete connaissent des triomphes retentissants avec les Cobaleda. Ils couperont même, avec Arruza, lors d’une corrida, en 1945, à Palencia la bagatelle de douze oreilles, six queues et six pattes. Les Cobaleda ont la réputation d’allier energie et suavité. Le travail de sélection de Francisco Villar et Arturo Cobaleda a fait du Vega-Villar une toro « petit mais costaud » et surtout armé.
En 1950, les frères et sœurs décident de se séparer.
Les Manuel Cobaleda
Manuel prend en charge la part qui lui revient et celles de ses deux sœurs. Jusqu’en 1960, les trois ganaderias réunies connaissent de nombreux succès. Mais petit à petit les années suivantes, les Cobaleda de Manuel et ses sœurs perdent leur aura auprès des professionnels. Le ganadero n’accepte aucun compromis sur la présentation et les armures de ses toros. Il est à contre courant d’une époque où sont sortis pour les vedettes plus de novillos arrangés que de toros limpios.
Par la suite, l’exigence d’avoir des toros volumineux pour faire oublier ceux des années précédentes mettra Manuel en difficulté. Les Vega-Villar sont des toros dont les squelettes ne peuvent pas supporter les poids exigés par la mode des « gros toros ». L’élevage sort alors essentiellement pour le rejoneo et dans quelques petites arènes. Quand Manuel décède, sa nièce Pilar, fille de Maria, reprend les rênes de la ganaderia. Elle et son époux mènent de front trois élevages, les Sanchez Cobaleda de son oncle, Castillejo de Huebra d’origine Murube et Buendia sur les terres de Maria. Malheureusement la crise et des problèmes sanitaires condamneront les Vega-Villar et les Buendia au matadero en 2010 .
Barcial et Barcialejo
Lors de la séparation de 1950, Ignacio crée la ganaderia Barcialejo et son frère annonce ses toros sous le nom de Barcial, noms des propriétés qu’ils ont reçues lors du partage avec leur frère et leurs sœurs.
Les élevages vont avoir de 1950 à 1968 des destinées parallèles. Ils vont permettre aux figuras de l’époque Ordoñez, Dominguin, Rafael Ortega et Gregorio Sanchez de triompher y compris dans les arènes de Las Ventas. Madrid les répète jusqu’à trois fois en un mois. La corrida madrilène du 17 mai 1959 est de celles qui restent dans les mémoires d’une plaza. Collaborateurs les Barcial ont permis à Antonio Bienvenida, Pepe Luis Vasquez et Aparicio de sortir par la Puerta Grande. Le lot de la corrida du 17 juin est nettement moins propice au succès. Heureusement la novillada du 3 septembre redore le blason des Vega-Villar.
José Luis et Arturo
Jesus décède peu après laissant les responsabilités de la ganaderia à ses fils José Luis et Arturo. Le premier s’associera avec son oncle Ignacio sous l’appellation Castillejo et le second garde celle de Barcial et le fer familial.
En 1960, à Madrid, Gregorio Sanchez triomphe en un solo imposé par la blessure de Fermin Murillo et le forfait d’Antonio Bienvenida, malade. La novillada de septembre 1961 offrent ses oreilles aux novilleros mais les utreros sont perçus comme « certes braves mais commodes et d’une noblesse à la limite de la bonté ».
En 1962 ce sont 5 lots de Barcial qui sortent à Madrid. Par contre il n’y en aura qu’un en 1963. Les Barcial sont victimes comme les produits de Manuel Sanchez Cobaleda de la mode du toro lourd ce qui incompatible avec la morphologie des Vega-Villar.
José Luis désabusé a vendu un lot de vaches à Luciano Cobaleda. Il vendra le reste à Alicio Tabernero dont le bétail partira au matadero quelques années plus tard.
Les terrifiques Luciano
Luciano est un membre de la famille Cobaleda. Il s’est essayé comme matador et a décidé de devenir ganadero en achetant du bétail à la famille. Il va se mettre en tête de produire un Vega-Villar haut, lourd et très armé. Si au début ses débuts à Las Ventas lui attire les faveurs des aficionados en particulier ceux de l’andanada du 8 (les ancêtres de ceux du tendido 7), le genio prend le dessus et ses toros deviennent de plus en plus mansos.

En sept corridas à Madrid, il fera passer la réputation de toros braves et nobles, appréciés des figuras, des Vega-Villar à une réputation de toros intoréables et destinés aux corridas dures pour les seconds couteaux. Pour éviter la ruine, il vend en 1984 à la rue et au matadero son bétail et se consacre à l’élevage de bovins pour la viande. L’image de toros compliqués des Luciano Cobaleda restera colllée à celle des Barcial.
D’Arturo à Jesus Cobaleda, les années difficiles
Quand son frère commence à baisser la bras, Arturo continue à maintenir le nom de Barcial. Lui aussi essaie d’augmenter le volume de ses novillos et toros. En sortant du morphotype de l’encaste, le genio se développe. La mansedumbre se fait plus présente. Le fer autrefois si prisé à Las Ventas y est programmé de façon épisodique. Les Barcial restent jusqu’à 5 ans sans venir à Madrid. Les toros et les novillos bien faits et armés, manquent de fond malgré quelques bons éléments. Le fer connait une période de mieux avec en particulier des novilladas très intéressantes. A Vic sort un grand novillo très armé nommé Cornicorto piqué à gusto par Michel Bouix et auquel Gilles Raoux coupe une oreille.
La Monumental des Pins de Roquefort présentera d’excellentes novilladas pour sa fête du 15 août. Puis à ces bons moments succèderont des moments moins bons. Heureusement que le Barcial, en particulier par ses armures, plait dans la rue ce qui permet à l’élevage de survivre économiquement parlant.
Jesus Cobaleda maintenir un encaste
Jesus a pris la succession de son père Arturo. Artiste Peintre, il essaie de sauvegarder un encaste qui est sous perfusion. Il a tenté un essai de rafraîchissement avec un semental du Conde de la Corte qui n’a pas donné de bons produits. Des problèmes sanitaires ont failli avoir raison de la ganaderia.
Jesus se bat pour sauver le patrimoine que représente cette branche de l’encaste Vega-Villar. Il est venu en France à Vic puis en 2024 à Céret et Orthez avec des résultats mitigés. Combien de temps sa passion lui permettra-t-elle de tenir, seul l’avenir nous le dira.

La branche Encinas-Galache
Encinas, tout commence par des triomphes
En 1923, Luis Antonio Encinas et son fils José ont acheté la part des Vega-Villar que possédait Vitorio Villar. Les toros sortent sous le nom de José et seront élevés sur les prés de la Finca « La Herfuena » près de Gejuelo del Barro.
Le nouvel élevage se présente dès le 8 juin 2023 à Madrid. Rapidement les Encinas acquièrent une solide réputation de toros braves et nobles. Comme pour les Barcial, José Encinas va profiter de l’excellent travail de sélection des frères Villar. Et comme il a, outre un caractère ombrageux, un vrai talent de ganadero, il va aller de succès en succès.
En 1923, il triomphe à Zaragoza. En 1925, c’est Madrid et à nouveau Zaragoza qui voient Lalanda, Niño de la Palma et Villalta couper oreilles et queue aux toros de La Herfuena. Ensuite en 1928, la camada est excellente avec un grand toro à Dax et un autre du même acabit à San Sebastian.
1929, 1930 les succès s’enchaînent. 1931 est une année plus compliquée avec des toros, comme chez d’autres confrères, faibles. Conséquence d’une fièvre aphteuse ou d’un engraissement forcé ??
José Encinas, vendre pour échapper à la faillite
Si les affaires taurines de José Encinas sont au beau fixe. Ses affaires professionnelles sont sous la tempête. Pour récupérer de la trésorerie, il vend 33% de son élevage à Juan Cobaleda fils de Bernabé et beau-frère d’Atanasio Fernandez.
Cela ne suffit pour lui sortir la tête hors de l’eau. En 1932, José Encinas vend 55% de son bétail à Luis Pla. Mais il garde sur ses terres, une pointe de bétail avec la possibilité de préempter une camada de vaches et deux toros. Heureusement pour la préservation de la souche Encinas des Vega-Vilar, car la ganaderia de Luis Pla sera anéantie lors de la Guerre Civile qui vient de se déclarer en Espagne.
José Encinas a acheté la ganaderia de Fernando Gonzalez Serrano. Il en élimine le bétail et ne garde que le fer. Les Camadas sont courtes. Deux corridas à Leon en 1933, une novillada en France en 1934 et puis surtout des erales pour maintenir à flot une trésorerie de plus en plus exsangue et José Encinas doit vendre. Commencent alors des négociations avec José Maria Galache que conclueront les héritiers de l’un et de l’autre. En effet José Maria décède à Salamanque et José est abattu lors d’une bagarre au Mexique. C’est donc Caridad Cobaleda qui devient propriétaire d’une cinquantaine de vaches et deux erales qu’accompagnent le vacher de José Encinas lors du transfert du bétail de La Huerfana à Hernandinos près de Villavieja.
Juan Cobaleda, ganadero à contre -emploi
Juan Cobaleda ne se montrera pas un grand éleveur de toros. Présentation et race vont souvent manquer Il a pourtant acquis une base solide avec le bétail acheté à José Encinas. Il faut attendre 1940 pour que qu’élevage connaisse une temporada « assez bonne ». L’année suivante Juan Cobaleda vend de ses deux élevages dont les Vega-Villar qu’il cède à Vincent Charro qui les transfèrent à Vecinos. Les premières années sont difficiles pour le ganadero qui doit faire lidier le bétail sélectionné par son prédécesseur. Vincent Charro est un aficionado passionné.
Il arrive à limiter la part de genio de son bétail quand il commence à faire lidier les produits qu’il a choisi. Malheureusement la ganaderia va avoir des résultats en progrès irréguliers Il vendra ses Vega-Villar en 1947 à Alicio Tabernero Paz. Vincent Charro continua ses expériences de ganaderos avec d’autres encastes. Alicio puis ses enfants feront lidier leurs Vega-Villar sous leur nom puis sous celui de Los Majadales après un apport de bétail de José Luis Cobaleda (voir plus haut) dont ils acquièrent le fer. La ganaderia survécut jusqu’à son élimination complète en 2005 après qu’un dernier lot soit sorti à Céret.
La famille Galache.
José Maria Galache n’est pas un néophyte en matière d’élevage de toros bravos. Son père était déjà ganadero et ses toros bruts de décoffrage inspiraient le respect. José Maria comprit très vite que ce type de toros n’était pas l’avenir. En 1928, il acquiert la ganaderia de Felix Urcola et, donc, dix ans plus tard entame les pourparlers avec José Encinas pour lui acheter ses Vega-Villar. C’est son épouse Caridad Cobaleda (de la famille de Juan Cobaleda) et ses deux fils Francisco et Salustiano finalise la transaction récupérant par la même occasion le fer de José Vega. A partir de cette date, la famille Galache mènera les deux encastes seront menées en parallèle et toute division ou cession du troupeau comprendra sa part d’Urcola et sa part de Vega-Villar.
Francisco Galache, un autre expert ganadero
Les Encinas migrent à Hernandinos. Très rapidement, sous la férule de Francisco, la ganaderia de la Veuve de Galache se fait un nom et remporte des succès significatifs. Dans les années 40, elle fait partie des meilleurs élevages prisés du public et des toreros. Manolete, El Estudiante, Arruza et d’autres triomphent grâce à eux en particulier à Madrid. A Valencia, en 1945, la terna leur coupe douze oreilles, cinq queues et deux pattes. Les Encinas de la famille Galache vont parfaitement convenir aux toreros des années cinquante et soixante. Ils se caractérisaient par de la bravoure naturelle et une très grande noblesse. Ils humiliaient en bons descendants des Saltillo du début du siècle. Pour compléter ces qualités, Francisco avait fait en sorte de diminuer le volume et les armures des Galache qui se différenciaient par la sorte de leurs cousins Barcial.
Donc dès le début des années 50, les Litri, Aparicio, Antonio Ordoñez et Luis Miguel Dominguin vont trouver dans les Galache, matière à exprimer leur tauromachie.
En 1953 Francisco, Salustiano et leur sœur Eusebia. se partagent le bétail des deux encastes .
En 1955, Antoñete triomphe à Madrid lors d’une encerrona. Parallèlement les toros de Salustiano sortent bien eux aussi. Camino, Litri, El Viti triomphent devant les Galache. Petit bémol, la faiblesse des Encinas ne permet pas à Palomo Linarès et El Cordobès de triompher en mai 1966.
Galache de mas à menos
Un an plus tard, les deux jeunes toreros se disputent le privilège de toréer les Paco Galache pour la San Isidro à condition que l’autre ne figure pas à l’affiche. La polémique enfle et le scandale est prêt à éclater. Victorino Martin, qui commence à se faire un nom, propose aux deux belluaires six de ses Albasserada pour un mano à mano. La corrida de Galache, avec le Cordobès, sort très faibles. Les figuras continuent pourtant à se les disputer.
Mais les Galache n’ont plus la côte auprès des critiques et des aficionados qui leur opposent les Victorino.
Ils ne voient plus que la faiblesse, le volume réduit et la noblesse fade des Galache les surnommant « Guirlaches » , guimauve en espagnol. La mode des gros toros finit de précipiter la ganaderia vers le bache. Paco a du mal à comprendre ce revirement, pour lui ces toros sont braves et bonitos. Petit à petit la ganaderia décline et passe de mode. A partir de 1990, fatigué, Paco, relâche la sélection. A son décès, en 2000, l’élevage est vraiment au plus bas.

Entre temps une partie des toros avaient été vendus à Justo Nieto (1971) .
Paco Galache
En 2002 en l’absence d’héritiers les anciens Encinas, et les Urcola, sont répartis entre les enfants d’Eusebia et Salustiano. Une partie, comprenant les deux encastes, est vendue à Victorino Martin qui souhaite utiliser les Encinas pour améliorer le comportement de ses Monteviejo issus de la branche Barcial.
Paco Galache, personnage haut en couleur, va s’efforcer de maintenir la ganaderia familiale. Avec son frère Manuel, ils échangent vaches et sementales. Paco a réduit le troupeau avec une sélection rigoureuse à 150 mères de Vega Villar et 70 d’Urcola. Les deux ganaderos font sortir leur bétail essentiellement en troisième catégorie. On a pu en voir récemment un lot en non piquée à Magescq.

En Octobre 2024, il a vendu la moitié de sa ganaderia à Héctor Guerrero et Domingo Pérez. Les deux aficionados de Tolède, fan de l’encaste Vega-Villar, ont fait l’acquisition de 120 vaches et quelques mâles. L’avenir nous dira si leur investissement a étté fructueux.
Le cas Monteviejo
Victorino Martin fils s’est pris d’un grand intérêt pour l’encaste Vega-Villar. Il a acheté à Arturo Cobaleda la moitié de son élevage en 1996. Vaches et sementales ont été tirés au sort entre le vendeur et l’acquéreur. Ainsi est née la ganaderia Monteviejo. Un nouveau règlement de l’UCTL lui permet de créer un fer nouveau dans une catégorie « Aspirants ».
Les premiers novillos sortent à Las Ventas, le 20 juin 1999. Le premier Monteviejo porte le nom de Cornicorto ce qui n’est pas sans rappeler de bons souvenirs aux Vicois. En 2022, le nouvel élevage intègre le sérail de l’UCTL.
Les résultats ne satisfont pas le ganadero. Les produits manquent de mobilité, défaut récurrent des Barcial. Victorino fils après avoir fait des essais avec des sementales de son fer historique achète un quart de l’élevage de Paco Galache mêlant le sang Cobaleda et Encinas espérant retrouver le Vega-Villar d’autrefois.
Il se concentre sur les novilladas pour avoir une réponse plus rapide à tous ces essais. Les résultats s’améliorent et depuis 2017 occupe le haut de l’escalafon des ganaderias en novilladas.
En 2018 il achète une nouvelle part de l’élevage de Paco Galache, pour affiner sa recherche d’un toro mobile et qui charge avec profondeur. A suivre,……………….
Les caractéristiques de l’encaste
Caractéristiques morphologiques principales.
- Toros courts et bas
- Toros légers malgré une apparente rondeur
- Cornes très développées
- Toros berrendos , avec bas des pattes blancs, dans toutes les nuances de couleurs possibles.
- Profil concave ou droit, la tête est courte, grands yeux d’aspect vifs
- Morillo bien développé / cou d’une longueur moyenne
- Ligne dorso-lombaire droite , ou légèrement ensellée
- Extrémités très courtes
Comportement en piste.
- Premier tiers
- Charge de loin
- S’emploie au contact du fer
- Sont souvent trop piqués
- Second tiers
- Compliqué à banderiller surtout s’ils ont été trop piqués.
- Troisième tiers
- Toros petits et légers mais avec du poder.
- Toros qui transmettent beaucoup et humilient avec classe à condition qu’ils n’aient pas été trop piqués
- Les Cobaleda encastés et compliqués à lidier n’ont plus la côte auprès des toreros. Ils sortent principalement en novilladas ou en rejon .
- Les Galache sont passés de mode car faibles et sosos avec des embestidas irrégulières.
Les Vega-Villar en France
Virgile Alexandre, ganaderia El Campo, ayant décidé de remplacer ses Cobaledas par du Domecq (origine Laugier), il ne reste plus qu’un seul élevage en France avec des origines Vega-Villar. Il s’agit de celui de François André dont les produits ont des origines Infante de la Camara et Cobaleda. Ce sont les derniers Patas Blancas français.
En résumé
Aujourd’hui il reste moins de 10 ganaderias qui ont des toros d’encaste Vega-Villar ce qui représente 700 vaches et une trentaine de sementales. L’encaste est en danger de disparition. Il a connu des heures de gloire mais le temps et l’évolution des modes en particulier avec la mode du « gros toro » lui a été fatal. Fruit du génie et du travail de grands ganaderos, son avenir repose essentiellement sur trois hommes à la personnalité très différentes.
Les deux premiers, Jesus Cobaleda et Paco Galache sont des ganaderos romantiques, pleins de bonne volonté, passionnés par leur patrimoine taurin mais dont les moyens matériels et financiers sont limités. La vente d’octobre 2024 d’une partie des Galache n’est pas de bon augure sur la santé financière de cet élevage.
Le troisième est un scientifique, fin connaiseur de l’élevage des toros. Il a entrepris un travail de fond en s’appuyant sur les souches Cobaleda et Encinas. L’homme est méthodique, souhaitons lui de réussir à faire renaître le Vega-Villar d’antan. Il faudra alors que les aficionados et les professionnels acceptent cet encaste avec ses caractéristiques physiques et comportementales propres. Ce sera peut-être cela le plus compliqué.
Sources : www.terresdetoros.fr, Corps des Présidents et Alguaciles de corridas, Terres Taurines, Chaine You Tube « Les Encastes »